Le Ravi

Publié le 24 Mars 2006

 

Le Ravi de Marcel Carbonel en taille 15 cm. Une gestuelle réaliste en parfaite harmonie avec le personnage.

Dans la pastorale des santons, le Ravi s'émerveille de la beauté du monde et des choses. Tant et si bien qu'il finit par agacer les autres en répétant toujours la même chose.

Moi, depuis quelques jours, je suis un peu comme lui, le printemps n'arrête pas de me ravir. Le spectacle de tous ces arbres en fleurs m'émeut et me réconcilie avec la nature qui sait se rendre si belle à la sortie de l'hiver.

Le ravi est un personnage que l'on croit à tort un peu fada , ou simplet. "Es un paou inoucen" comme on dit par chez nous,  en ajoutant :"inoucen d'Aniano", en faisant allusion à une maison d'accueil pour les fous qu'il y aurait eu jadis à Aniane, dans le pays haut.  

En fait avant on n'enfermait que les fous dangereux. Il y avait au village des gens un peu dérangés. On disait qu'ils avaient le tracassin, que quelque chose les tracasssait, leur donnait du souci au point de monopoliser leur pensée sur quelques idées fixes, avec parfois des manies, des comportements un peu bizarres, des paroles insensées. Ils faisaient rire, on se moquait d'eux, mais on ne leur voulait aucun mal.

Dans ma famille, la soeur de mon grand'père a sombré peu à peu dans une espèce de folie. Elle ne s'est jamais mariée, elle avait la phobie des microbes, elle en voyait partout. Elle ne voulait pas qu'on s'approche d'elle, elle avait peur de nous transmettre je ne sais quelle maladie. Mes grands-parents l'ont gardée longtemps avec eux, elle était un peu particulière mais brave femme. Puis quand son état s'est dégradé, qu'ils n'arrivaient plus à la raisonner, ils ont fini par la placer à "Font d'Aurèle", qui était alors hôpital des fous de Montpellier. Ma mère m'amenait la voir de temps en temps. J'avais un peu peur d'elle. Pourtant quand elle était bien lunée, comme on disait, elle demandait des nouvelles de tout le monde, je veux dire de la famille et des gens du village. Ca fait déjà pas mal de monde... Les psychotropes n'existaient pas encore et c'étaient surtout les riches qui faisaient des dépressions nerveuses . Les gens parlaient, se parlaient et ne s'enfermaient pas dans l'individualisme solitaire actuel. A la campagne, il y avait trop à faire avec les soucis que donnaient les travaux des champs, on n'avait guère le temps de tourner la boule, je veux dire de devenir fou.

Mais, revenons au Ravi. Il ne travaille pas. Non qu'il soit fainéant, mais il n'a pas le temps. Il est trop en admiration des choses, ça l'occuppe toute la journée, et la nuit il rêve des étoiles dont il connaît les secrets à force de les contempler. Le Ravi a tout compris du mystère de la la naissance de l'enfant dans la crèche. Il n'a pas eu besoin d'entendre chanter comme les bergers les anges dans nos campagnes. L'hymne des cieux il l'a dans son coeur.

Rédigé par Daniel

Publié dans #crèches et santons

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